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Grève du 10 septembre : “Un stress particulier pour les salariés”, alerte Philippe Goj

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Grève du 10 septembre : “Un stress particulier pour les salariés”, alerte Philippe Goj

Transports paralysés, routes bloquées, services publics à l’arrêt… La mobilisation du 10 septembre a créé un chaos inédit en Île-de-France. Au-delà des désagréments, quels sont les impacts psychologiques sur les travailleurs ? Philippe Goj, président du Ciamt, tire la sonnette d’alarme.

Jeudi 10 septembre, 6h30. Marine, comptable dans une entreprise de Boulogne-Billancourt, découvre sur son téléphone l’ampleur des perturbations. RER A interrompu, ligne 13 fermée, périphérique bloqué… “J’ai mis trois heures pour arriver au bureau au lieu de 45 minutes habituellement. J’étais en stress permanent, j’avais trois rendez-vous dans la matinée”, témoigne-t-elle.

Le mouvement “Bloquons tout”, organisé pour protester contre les 43,8 milliards d’euros d’économies annoncées par le gouvernement Bayrou, a effectivement tout bloqué. Mais ses répercussions vont bien au-delà des simples retards.

Quand le trajet devient un parcours du combattant

“Ce type de mobilisation génère un stress particulier chez les travailleurs, au-delà des simples désagréments de transport”, observe Philippe Goj, président du Centre inter-entreprises et artisanal de santé au travail (Ciamt). Dans son centre, les appels se sont multipliés depuis la grève. “Nous recevons des salariés épuisés, angoissés à l’idée de ne pas arriver à l’heure, de décevoir leur hiérarchie.”

Le phénomène n’est pas nouveau, mais son ampleur interroge. “Un trajet qui passe de 45 minutes à 2h30 n’est pas qu’un désagrément logistique. C’est un facteur de stress chronique”, explique Philippe Goj. Et les conséquences se ressentent rapidement : fatigue accrue, irritabilité, troubles du sommeil…

Pierre, cadre commercial de 42 ans, en fait les frais : “Depuis les grèves à répétition, je dors mal. Je me lève plus tôt pour anticiper les galères de transport, je stresse dès que je vois une notification RATP sur mon téléphone.”

L’angoisse de l’incertitude économique

Mais le malaise va plus loin. Ces mobilisations cristallisent les inquiétudes sur l’avenir économique du pays. “Les salariés s’interrogent sur la stabilité de leur emploi face aux mesures d’économies, sur l’évolution de leurs conditions de travail”, analyse le président du Ciamt.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : selon l’OMS, 15% des adultes en âge de travailler souffrent déjà d’un trouble mental. “Les périodes de tension sociale comme celle que nous traversons peuvent faire basculer des personnes en situation de fragilité vers des troubles plus sévères”, s’inquiète Philippe Goj.

Sandrine, responsable RH dans une PME parisienne, le constate au quotidien : “J’ai eu trois arrêts maladie pour burn-out depuis le début de l’année. Les gens craquent. Entre l’incertitude politique, les grèves à répétition et la charge de travail qui augmente, c’est la goutte d’eau.”

Des entreprises pas toujours préparées

Face à cette situation, toutes les entreprises ne sont pas égales. Certaines ont mis en place des mesures d’urgence : télétravail renforcé, horaires flexibles, réunions reportées. D’autres subissent.

“La différence se fait sur l’anticipation et la communication”, souligne Philippe Goj. Son conseil ? “Informer régulièrement, rassurer quand c’est possible, adapter l’organisation. Et surtout, sensibiliser les managers aux signes de stress chez leurs équipes.”

Le Ciamt recommande des mesures concrètes : assouplir les horaires, privilégier la visioconférence, adapter la charge de travail en cas de retards répétés. “Il faut sortir de la logique punitive. Un salarié en retard à cause des grèves n’est pas un mauvais salarié.”

Le coût invisible du stress

L’enjeu dépasse le simple bien-être individuel. Les troubles anxieux et dépressifs liés au travail coûtent cher : 12 milliards de jours de travail perdus chaque année dans le monde, soit 1000 milliards de dollars de perte de productivité.

“Chaque crise sociale est une opportunité d’améliorer nos pratiques de prévention”, estime Philippe Goj. “Les entreprises qui sauront tirer les leçons de ces épisodes seront mieux armées pour protéger la santé mentale de leurs salariés.”

En attendant, Marine a trouvé sa solution : “Je pars maintenant une heure plus tôt, avec un livre et des écouteurs. Si ça bloque, au moins je suis préparée psychologiquement.”

Une approche pragmatique que ne renierait pas le président du Ciamt : “Face à ce qu’on ne contrôle pas, il faut apprendre à s’adapter. C’est ça aussi, la prévention.”


Le Ciamt est l’un des principaux acteurs de la santé au travail en île de France. Plus d’informations sur ciamt.org

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